Demande de remboursement des aides COVID-19 par l’URSSAF : défendez-vous et faites-la condamner !
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L'article L 244-2 du code de sécurité sociale dispose que toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'Etat invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant.
Selon la jurisprudence[1], il en résulte qu'à peine de nullité, la mise en demeure, adressée à l'employeur ou au travailleur indépendant, qui précède toute action ou poursuite effectuée en application de l'article L. 244-1 ou des articles L. 244-6 et L. 244-11 du même code doit mentionner le délai d'un mois dans lequel le débiteur doit régulariser sa situation.
Selon la jurisprudence constante[2], la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti et la contrainte délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.
Ces règles se sont retrouvées traduites par les dispositions de l'article R 244-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007 qui disposent que l'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Aux termes de l'article R. 243-43-3 du code de sécurité sociale, pour l'exercice des missions définies à l'article L. 213-1, les organismes de recouvrement procèdent à la vérification de l'exactitude et de la conformité à la législation en vigueur des déclarations qui leur sont transmises par les travailleurs indépendants et les employeurs, personnes privées ou publiques. A cette fin, ils peuvent rapprocher les informations portées sur ces déclarations avec celles mentionnées sur les documents qui leur ont déjà été transmis par le cotisant ainsi qu'avec les informations que d'autres institutions peuvent légalement leur communiquer.
Les organismes de recouvrement peuvent demander par écrit au cotisant de leur communiquer tout document ou information complémentaire nécessaire pour procéder aux vérifications mentionnées à l'alinéa précédent.
Les résultats des vérifications effectuées au premier alinéa du présent article ne préjugent pas des constatations pouvant être opérées par les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 243-7.
L'article R. 243-43-4 du code de sécurité sociale précise ce qui suit :
« Lorsqu'à l'issue des vérifications mentionnées à l'article R. 243-43-3, l'organisme de recouvrement envisage un redressement, il en informe le cotisant en lui indiquant :
1° Les déclarations et les documents examinés ;
2° Les périodes auxquelles se rapportent ces déclarations et documents ;
3° Le motif, le mode de calcul et le montant du redressement envisagé ;
4° La faculté dont il dispose de se faire assister d'un conseil de son choix pour répondre aux observations faites, sa réponse devant être notifiée à l'organisme de recouvrement dans un délai de trente jours ;
5° Le droit pour l'organisme d'engager la mise en recouvrement en l'absence de réponse de sa part à l'issue de ce même délai.
Lorsque le cotisant a fait part de ses observations dans le délai prévu au 4°, l'organisme de recouvrement lui confirme s'il maintient ou non sa décision d'engager la mise en recouvrement pour tout ou partie des sommes en cause.
L'organisme de recouvrement engage, dans les conditions définies à l'article R. 244-1, la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et des pénalités de retard faisant l'objet du redressement :
-soit à l'issue du délai fixé au 4° en l'absence de réponse du cotisant parvenue dans ce délai à l'organisme ;
-soit après l'envoi par l'organisme de recouvrement du courrier par lequel il a été répondu aux observations du cotisant.
Lorsqu'à l'issue des vérifications mentionnées à l'article R. 243-43-3, l'organisme de recouvrement constate que les sommes qui lui ont été versées excèdent les sommes dont l'employeur ou le travailleur indépendant était redevable, il en informe l'intéressé en précisant les modalités d'imputation ou de remboursement. »
La validité du redressement auquel il peut être procédé à l'issue de cette procédure de vérification sur pièces est subordonnée au respect des formalités édictées, pour conférer à la procédure un caractère contradictoire, par l'article R. 243-43-4[3].
Dans une espèce, après avoir informé une société de la réception de sa déclaration d'aide au versement des cotisations instituée dans le cadre de la crise sanitaire liée au Covid 19, l'URSSAF CHAMPAGNE ARDENNES a informé cette même société que le bénéfice de ce dispositif concernant le secteur d'activité de celle-ci supposait un effectif inférieur à 50 salariés, ce qui n'était pas le cas.
Cet organisme de sécurité sociale lui a demandé de régulariser dès que possible ses précédentes déclarations en retirant l'aide au paiement des cotisations et l'exonération Covid 19.
L'URSSAF a informé la société que l'examen des déclarations sociales nominatives indiquant que cette dernière avait déclaré des sommes au titre de l'exonération Covid de cotisations patronales et d'aide au paiement des cotisations (avec indication des périodes et des montants) alors qu'elle n'était pas éligible à ces mesures exceptionnelles compte tenu de ses effectifs annuels moyens et de son secteur d'activité, entrainant une remise en cause de ces mesures conduisant à un rappel de cotisations, ce courrier précisant ensuite les voies et délais de recours.
Les opérations d'examen des déclarations sociales nominatives auxquelles a procédé l'URSSAF ne sauraient se rapporter à un contrôle sur place ou encore un contrôle sur pièces, notamment en raison de l'effectif de la société.
En revanche, et comme l'URSSAF le soutient, ces opérations relèvent du cadre des vérifications sur pièces prévues aux articles R. 243-43-3 et R. 243-43-4 du code de sécurité sociale.
Il résulte de ces dispositions que lorsque l'URSSAF entend faire usage procéder à une vérification en application de ces textes, cet organisme de sécurité sociale doit, d'une part, en informer le cotisant selon les modalités énoncées à l'article R. 243-43-4 alinéa 1e, d'autre part, en cas d'observation lui confirmer s'il maintient ou non sa décision d'engager la mise en recouvrement pour tout ou partie des sommes en cause.
Il s'ensuit que cet organisme s'il entend poursuivre le recouvrement y procède ensuite par la délivrance d'une mise en demeure selon les conditions de l'article R. 244-1 du code de sécurité sociale auxquelles les dispositions en cause font référence.
Il s'ensuit qu'en l'état des énonciations figurant sur les lettres de l’URSSAF qui se bornent à informer la société de son inéligibilité aux mesures d'exonération et d'aide au paiement des cotisations, la société ne saurait se prévaloir d'une absence de mise en demeure dès lors que par cette décision l'URSSAF n'entend pas encore poursuivre le recouvrement des sommes en cause puisqu'elle informe la société que cette remise en cause entrainera un rappel de cotisations
En revanche, il convient de constater que les lettres de l’URSSAF ne comportent pas les informations concernant le mode de calcul et le montant du redressement envisagé, la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix pour répondre aux observations faites, sa réponse devant être notifiée à l'organisme de recouvrement dans un délai de trente jours et l'information quant au droit pour l'organisme d'engager la mise en recouvrement en l'absence de réponse de sa part à l'issue de ce même délai.
Il s'ensuit que les formalités édictées par ces textes, pour conférer à la procédure un caractère contradictoire n'ayant pas été respectées, le redressement auquel a entendu procéder l'URSSAF n'est pas valide et de rejeter ses demandes en paiements.
Suites, la Cour d'appel de Nancy a déclaré irrégulière la procédure de vérification et redressement de l'URSSAF CHAMPAGNE ARDENNES à l'égard de la société, rejeté les demandes de l'URSSAF CHAMPAGNE ARDENNES, condamné l’URSSAF CHAMPAGNE ARDENNES aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile[4].
Dans une autre espèce, l’URSSAF Île-de -France informait une société de la suppression des CTP déclarées au titre des mesures Covid dans ses DSN, avant de lui notifier, une mise en demeure d'avoir à régler la somme de 1 203 437 €, soit 1 368 581 € à titre de cotisations et contributions sociales, déduction faite d'un montant déjà payé de 165 144 €, puis, de lui signifier, une contrainte pour avoir paiement de la somme totale de 1 204 169,68€.
Il s'en déduit que le courrier résulte d'un rapprochement entre les déclarations sociales nominatives et l'activité déclarée par l'association. Pour ce faire, hors cadre d'une opération de contrôle plus général, la caisse a nécessairement recouru à une procédure de vérification.
Pour le Tribunal judiciaire de Nanterre, à l'évidence, le courrier ne répond à aucune de ces conditions, pourtant prévues comme formalités substantielles conditionnant le caractère contradictoire de la procédure. Il en résulte que la procédure de recouvrement qui s'en est suivie, ne peut qu'être annulée. Il en sera ainsi de la mise en demeure et de la contrainte. L'URSSAF Île-de -France a été condamnée aux dépens.
Tribunal judiciaire de Nanterre - CTX Protection sociale 3 décembre 2024 / n° 23/01189
Dans une autre espèce, le Tribunal Judiciaire de Marseille a constaté que l’URSSAF PACA n’a pas mentionné dans son courrier que la société disposait d’un délai de 30 jours pour faire valoir ses observations. En effet, il est uniquement précisé : « vous avez la possibilité de vous faire assister d’un conseil de votre choix pour répondre aux observations formulées dans ce courrier ».
Il s’ensuit que les formalités édictées par ces textes, pour conférer à la procédure un caractère contradictoire, n’ont pas été respectées.
Le redressement auquel a entendu procéder l’URSSAF n’est par conséquent pas valide et l’organisme sera débouté de ses demandes en paiement.
Le Tribunal Judiciaire de Marseille a condamné l’URSSAF PACA à verser à la société la somme de 1 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens[5].
[1] Cass. 2e Civ., 19 décembre 2019 n° 18-23.623
[2] Cass. Soc 19 mars 1992, n° 88-11.682
[3] Cass. 2e Civ., 28 mai 2014, n° 13-18.066
[4] Cour d'appel de Nancy - Chambre Sociale-1ère sect 16 janvier 2024 n° 23/01680
[5] Tribunal judiciaire de Marseille - GNAL SEC SOC : URSSAF 19 novembre 2024 / n° 24/00772
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Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
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