Le harcèlement sexuel laisse des traces : comment le prouver ?
Aux termes de l'article L. 1153-1 du code du travail,
« Aucun salarié ne doit subir des faits :
1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
Le harcèlement sexuel est également constitué :
a) Lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;
b) Lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ;
2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers. »
La charge de la preuve d’un harcèlement sexuel ne repose pas intégralement sur la victime
Contrairement à ce que soutiennent souvent les employeurs, la charge de la preuve du harcèlement sexuel dont elle a été victime n'incombe pas à la salariée qui doit uniquement rapporter des éléments qui pris dans leur ensemble laissent présumer l'existence d'un harcèlement sexuel[1].
Le conseil de prud'hommes, en déboutant la salariée au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve du harcèlement sexuel dont elle a été victime, a fait peser que celle-ci l'intégralité de la charge de la preuve, en violation de l'article L 1154-1 du code du travail[2].
En effet, la salariée qui allègue un harcèlement sexuel doit, en application des dispositions de l'article L 1154-1 du Code du travail, présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement sexuel, étant rappelé que le harcèlement est défini par l'article L 1153-1 du Code précité comme tous propos, comportements à connotation sexuelle répétés qui, soit portent atteinte à la dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à l'encontre de la victime une situation intimidante, hostile ou offensante, ou encore tous propos, comportements de cette nature venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée, ou alors tous propos comportement de cette nature, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos, comportements caractérisent une répétition, ou bien toute forme de pression grave même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.
Au vu de ces éléments, il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement sexuel et que la situation est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Les faits allégués ne peuvent pas reposer que sur les seules déclarations de la victime
Les faits allégués ne reposant que sur ses seules déclarations, il ne peut être retenu qu'elle établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement sexuel[3].
La victime peut présenter des SMS, des messages Whatsapp de son harceleur
La production de courts messages par le biais de téléphone portable (SMS) par leur destinataire pour faire la preuve d'un harcèlement sexuel est licite, l'expéditeur ne pouvant ignorer qu'ils sont enregistrés par l'appareil récepteur[4] ; de même pour des messages sur le support whatsapp de son téléphone[5].
La victime peut présenter des attestations de témoins
Il peut résulter d’attestations précises et circonstanciées la preuve d'un harcèlement sexuel[6].
La victime peut présenter ses dénonciations auprès de différents interlocuteurs officiels
Les dénonciations opérées par la salariée auprès de différents interlocuteurs officiels (lettre recommandée à l’inspection du travail, plainte pour agression sexuelle auprès du commissariat, plainte auprès du procureur de la République pour agression sexuelle et harcèlement sexuel) étant étayées par les attestations de deux anciennes salariées, et les constatations médicales étant compatibles avec les conséquences du harcèlement allégué, ces éléments de fait permettent de présumer l'existence d'un harcèlement[7].
La victime peut enregistrer clandestinement son harceleur
A lire :
Les preuves illicites sont désormais admises pour se défendre aux Prud’hommes
[1] Cour d'appel de Poitiers - Chambre sociale 27 juillet 2023 n° 21/02039
[2] Cour d'appel de Reims - Chambre sociale 4 septembre 2024 n° 23/01030
[3] Cour d'appel de Bordeaux - CHAMBRE SOCIALE SECTION A 22 novembre 2023 / n° 20/05001
[4] Cass. soc. 23-5-2007 n° 06-43.209 : RJDA 10/07 n° 1043
Cour d'appel de Douai - Sociale D salle 3 22 décembre 2023 n° 22/00986
[5] Cour d'appel de Fort-de-France - Chambre sociale 19 janvier 2024 / n° 22/00044
[6] Cour d'appel de de Caen - ch. sociale 01 24 février 2017 n° 15/02782
[7] Cour d'appel de Paris - Pôle 6 - Chambre 9 31 janvier 2024 n° 21/02692
Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
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