Mise en demeure MSA : que faire si les motifs invoqués sont incompréhensibles ?
Vous avez reçu une mise en demeure de la MSA, mais vous ne comprenez ni les calculs opérés, ni les déductions prises en compte, ni les périodes concernées par les majorations ? Découvrez dans quels cas la contrainte peut être annulée pour défaut de motivation.
La régularité formelle de la mise en demeure émise par la Mutualité sociale agricole (MSA) conditionne la validité de la procédure de recouvrement engagée à l’encontre du cotisant. En application de l’article R. 725-6 du Code rural et de la pêche maritime, la mise en demeure doit comporter, à peine de nullité, des mentions précises permettant au débiteur de comprendre ce qui lui est réclamé. Cette exigence de motivation vise à garantir le respect du contradictoire et à permettre à l’intéressé d’exercer utilement ses droits, notamment en matière de recours.
En pratique, des irrégularités sont fréquemment relevées lorsque la mise en demeure omet d’indiquer les périodes concernées, les déductions opérées ou encore les éléments permettant de vérifier les majorations de retard appliquées. Or, une telle opacité prive le cotisant de la possibilité de vérifier l’exactitude des sommes réclamées, ce qui peut entraîner la nullité non seulement de la mise en demeure, mais également de la contrainte qui en est la suite directe.
La jurisprudence rappelle régulièrement que l’absence de motivation suffisante constitue une irrégularité substantielle, insusceptible d’être couverte par des explications ultérieures produites en cours d’instance.
Cette exigence de motivation est expressément prévue par l’article R. 725-6 du Code rural et de la pêche maritime, qui fixe les mentions devant obligatoirement figurer dans la mise en demeure, à peine de nullité. Ce texte encadre strictement la procédure et conditionne la régularité des actes de recouvrement engagés par la MSA.
L'article R.725-6 du code rural et de la pêche maritime dispose :
« Avant d'engager l'une des procédures prévues aux articles L. 725-3 à L. 725-5, la caisse de mutualité sociale agricole ou, en cas de carence de celle-ci, le préfet de région doit adresser au débiteur une lettre recommandée, avec demande d'avis de réception, le mettant en demeure de s'acquitter de sa dette dans un délai d'un mois.
La mise en demeure doit, sous peine de nullité, indiquer :
1° La cause, la nature et le montant des cotisations impayées ou des remboursements réclamés et les périodes pour lesquelles les cotisations ou les remboursements sont dus, ainsi que, le cas échéant, le montant et le mode de calcul des majorations et pénalités de retard ;
2° Les voies de recours dont dispose le redevable en application des articles R. 142-1 et R. 142-10-1 du code de la sécurité sociale et les délais dans lesquels elles peuvent être exercées.
Les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale sont applicables sous réserve des adaptations suivantes :
a) Les mots : “ la mise en demeure ou l'avertissement est établi ” sont remplacés par les mots : “ la mise en demeure est établie ” ;
b) La référence à l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale est remplacée par la référence à l'article L. 724-11 du présent code. »
La Cour d'appel de Caen a jugé[1] :
« Monsieur [Z] considère au contraire que ni la contrainte ni les mises en demeure ne sont motivées.
Aucune des mises en demeure ne fait état des règlements intervenus, volontairement ou par prélèvements, alors que la contrainte mentionne une somme de 11 916,78 euros au titre de déductions.
Par ailleurs, la mise en demeure du 24 janvier 2020, qui fait partie des mises en demeure visées dans la contrainte, mentionne un reste à payer au seul titre de l'année 2019 de 12 085,95 euros (11 466,87 euros en principal et 619,08 euros).
La MSA indique pourtant dans ses conclusions, en se référant à cette même mise en demeure, que le montant des cotisations dues pour 2019 est de 609,13 euros et celui des majorations de 32,88 euros.
Aucun élément de la mise en demeure du 24 janvier 2020 ne permet donc de comprendre le calcul de ces cotisations et majorations et de savoir pourquoi sur un montant réclamé de 12 085,95 euros, seules sont dues et reprises dans la contrainte les sommes de 609,13 euros et 32,88 euros.
La contrainte reprend en effet en principal une somme de 18 350,22 euros, des majorations de retard de 1 370 euros, ainsi qu'une déduction de 11 916,78 euros.
Ainsi qu'il ressort des observations ci-dessus, aucune des mises en demeure visées dans la contrainte ne met en mesure l'assuré de comprendre les calculs opérés, les déductions prises en compte, ni même les périodes concernées par les majorations. Il est en effet nécessaire de se référer aux explications données par la MSA dans ses écritures pour retrouver dans chaque mise en demeure, puis dans la contrainte, chaque somme due pour chacune des périodes visées. En revanche, en l'absence de ces explications, ni les mises en demeure, ni la contrainte ne répondent aux exigences de l'article R.725-6 du code rural et de la pêche maritime.
La nullité de la contrainte doit en conséquence être prononcée pour défaut de motivation »
Cette décision illustre avec clarté que la seule mention de montants globaux, sans explication intelligible sur les périodes concernées, les déductions opérées et les majorations appliquées, ne suffit pas à satisfaire aux exigences de motivation imposées par le Code rural. La régularité de la mise en demeure s’apprécie en elle-même, indépendamment des explications apportées a posteriori par l’organisme de recouvrement.
[1] Cour d'appel de Caen - 2ème chambre sociale 13 mars 2025 / n° 23/00492
Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
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