Pourquoi faut-il vérifier l’imputation par l’URSSAF de vos paiements ?

 

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Les règles de l'imputation des payements prévues à l'article 1342-10 du code civil sont, en principe, applicables en matière de sécurité sociale.

L’article 1342-10 du code civil dispose :

« Le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu'il paie, celle qu'il entend acquitter. 

A défaut d'indication par le débiteur, l'imputation a lieu comme suit : d'abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d'intérêt d'acquitter. A égalité d'intérêt, l'imputation se fait sur la plus ancienne ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement. »

Par dérogation aux dispositions de l’article 1342-10 du code civil, les règles d’imputation des versements de cotisations et contributions sociales sont régies par des dispositions spéciales.

Ainsi, l’article D.133-4 du code de la sécurité sociale, établit un ordre de priorité d’affectation des cotisations dues à un même organisme.

L'article D. 133-4 du code de la sécurité sociale indique que

« I.-Le solde mentionné à l'article L. 133-4-11 est affecté dans des proportions identiques aux cotisations et contributions patronales dues par l'employeur.

II.-Les versements réalisés par un travailleur indépendant à une date d'échéance de paiement des cotisations et contributions sociales s'imputent par priorité sur les cotisations et contributions dues au titre de cette échéance.

Lorsque seule une partie des cotisations et contributions sociales dues au titre d'une échéance est acquittée, les sommes versées sont affectées selon l'ordre de priorité suivant :

1° Les contributions mentionnées à l'article L. 136-3 du présent code et à l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale dans des proportions identiques ;

2° La cotisation d'assurance maladie et maternité ;

3° La cotisation d'assurance vieillesse de base ;

4° La cotisation d'assurance invalidité-décès ;

5° Les cotisations d'assurance vieillesse complémentaire ;

6° La cotisation d'allocations familiales ;

7° La contribution à la formation professionnelle mentionnée à l'article L. 6331-48 du code du travail ;

8° La taxe pour frais de chambre consulaire mentionnée aux articles 1600 A et 1601-0 A du code général des impôts pour les travailleurs indépendants relevant des dispositions de l'article L. 613-7.

Lorsque les sommes versées excèdent les cotisations et contributions sociales dues au titre d'une échéance, le reliquat est affecté par priorité, le cas échéant, aux cotisations et contributions impayées dues au titre de l'échéance la plus ancienne, selon l'ordre de priorité prévu au présent II. »

  

En l’absence d’indication de l’imputation des paiements

Un versement fait par un cotisant, en l'absence d’indication contraire, s'impute d'abord sur les sommes dues au titre des cotisations dont le non versement l'expose à des sanctions plus graves et non sur les majorations de retard alors même que celles-ci seraient dues depuis plus longtemps[1].

Il ne peut être déduit que le seul fait de procéder à un paiement partiel suite à une demande de l’URSSAF constitue une demande expresse de voir imputer ce paiement sur les cotisations réclamées[2].

En l’absence d’indication de ce que vous entendez vous acquitter, l’URSSAF doit imputer vos versements sur les dettes dont vous avez le plus intérêt de vous acquitter, et à égalité d’intérêt les plus anciennes

La Cour d’appel de Paris a jugé[3] :

« A défaut d'avoir précisé pour chacun des paiements qu'il souhaitait leur imputation sur l'appel de cotisations le plus récent, le cotisant ne peut donc reprocher à la CIPAV puis à l'URSSAF de les avoir imputés sur les cotisations appelées antérieurement. »

La Cour d’appel de Montpellier a jugé[4] :

« il appartenait à la CIPAV d'imputer les paiements réalisés par le cotisant en 2015 sur les cotisations de l'année 2013 permettant ainsi de solder sa dette la plus ancienne. Or, l'organisme social n'a pas respecté ces prescriptions.
Par conséquent, les sommes réclamées au titre de la contrainte émise par la CIPAV le 28 janvier 2015 ne sont pas fondées. »

Le Tribunal judicaire de Lyon a jugé[5] :

« l’affectation par l’URSSAF Ile-de-France des sommes réglées par monsieur [G] [L] en 2021 n’est pas conforme aux dispositions de l’article D.133-4 du code de la sécurité sociale précité, en ce que ces règlements devaient être affectées en priorité sur les cotisations dues au titre de la dernière échéance, c’est-à-dire au titre de l’année 2021. »

La Cour d’appel de Rennes a jugé[6] :

« les paiements effectués par M. [B] entre le 14 novembre 2016 et le 24 septembre 2019 devaient tous être imputés sur la contrainte émise le 16 mars 2016. » 

La Cour d’appel de Rennes a jugé[7] :

« Contrairement à ce que soutient l'URSSAF, aucun élément au dossier ne permet d'imputer ces acomptes sur les sept contraintes, le document produit relatif à l'état des versements au 4 avril 2023 ne contient aucun détail sur l'affectation des sommes précitées sur les sept contraintes.

Il convient dès lors de faire application des dispositions de l'article 1342-10 du code civil relatif aux règles d'imputation des paiements.

Aux termes de ces dispositions, le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu'il paie, celle qu'il entend acquitter.

A défaut d'indication par le débiteur, l'imputation a lieu comme suit : d'abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d'intérêt d'acquitter. A égalité d'intérêt, l'imputation se fait sur la plus ancienne ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement.

En l'occurrence, les dettes étant toutes échues, et à égalité d'intérêt, l'imputation doit se faire sur la dette la plus ancienne, à savoir la contrainte du 23 décembre 2015 signifiée le 8 janvier 2016 correspondant au dossier n° 2201924 mentionné dans le procès-verbal de saisie-attribution pour un montant de 5 822,27 euros.

Les virements opérés les 25 et 26 juillet 2018 ont eu pour effet d'interrompre le délai de prescription, conformément aux dispositions de l'article 2240 du code civil.

Par conséquent, un nouveau délai de trois ans a couru à compter du 26 juillet 2018 pour prendre fin le 26 juillet 2021. »

 

En présence d’indication de l’imputation des paiements

Quand vous indiquez, lorsque vous payez, les cotisations que vous entendez vous acquitter, l’URSSAF ne peut pas choisir d'imputer les versements au paiement des cotisations « courantes ».

Aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit que le créancier puisse, après avoir affecté un paiement à une de ses créances, sans que cette affectation soit contestée par le débiteur, modifier ensuite celle-ci[8].

La Cour d’appel de Metz a jugé :

« La SAS [X] verse notamment aux débats un bordereau d'accompagnement-Virement émis le 31 janvier 2019 (pièce n°21 de la société) montrant que la somme de 8 235,81 euros a été virée ce jour à l'URSSAF par la SAS [X], comprenant celle de 3 583,14 euros que la société a indiqué affecter, dans la rubrique « information », à la « MED 16/12/2016 440289908 période 2014/15 chef de redressement 1 ».

Par ailleurs, la SAS [X] démontre également par la production d'un document bancaire intitulé « liste des mouvements -virements émis » concernant la journée du 7 décembre 2018, que la somme de 1 145 euros a été virée à l'URSSAF Lorraine, la rubrique « information » de la remise de virements SEPA précisant pour cette somme « MED du 16/12/2016 440289908 période 2014/15 chef de redressement 3 ».

La SAS [X] verse enfin un courriel établi le 28 décembre 2018 par son assistante de direction et adressé à l'URSSAF par lequel elle indique que la somme de 139 euros comprise dans la somme totale de 1 641 euros virée le 27 décembre 2018 correspond à la « MED 16/12/2016 440 289 908 période 2014 15 chef de redressement 2 ».

La SAS [X] ayant ainsi affecté l'ensemble de ces trois sommes de 3 563,14 euros, 1 145 euros et 139 euros au règlement des montants réclamés respectivement au titre des chefs de redressement 1, 3 et 2, l'URSSAF Lorraine ne pouvait pas choisir d'imputer les versements de 1 145 euros et 139 euros au paiement des cotisations « courantes ».

Il convient dès lors de faire droit à la demande en remboursement formée par la SAS [X] et de condamner l'URSSAF Lorraine à lui payer la somme totale de 3 563,14 euros. »

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a jugé[9] :

« La contrainte datée du 18/06/2013 d'un montant total de 11 308 euros, porte sur les cotisations afférentes aux années 2007 (pour un montant de 4 562 euros) et 2008 (pour un montant de 5 432 euros). Elle a été frappée opposition et par jugement en date du 6 septembre 2016 (référence 21301043), le tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes-Maritimes a rejeté cette opposition et a validé cette contrainte pour son entier montant (soit 11 308 euros).

Par courrier en date du 5 décembre 2016, l'huissier mandaté par l'URSSAF pour l'exécution de ce jugement a écrit à la société 'étant donné que vous avez visiblement réglé les principaux à l'URSSAF, je vous remercie de solder les frais engagés dans ce dossier qui ont été avancés par l'URSSAF et qui restent à votre charge pour un montant de 198.90 euros'.

Ainsi que retenu par les premiers juges, cette lettre à laquelle est joint un décompte, mentionnant au crédit huit versements directs effectués entre le 31 mai 2010 et le 15 avril 2014, dont les montants précisés totalisent la somme de 11 351 euros, prouve le paiement par la société [9] des cotisations 2007 et 2008 objets de la contrainte précitée, ce qui fait obstacle à ce que l'URSSAF qui ne justifie nullement que ces affectations de paiement auraient été contestées par la société [9] puisse désormais alléguer que les paiements précisément listés dans le décompte de son mandataire auraient été affectés, à une date qu'elle ne précise du reste pas, au paiement d'autres cotisations.

La cour constate en outre que les paiements listés dans les conclusions de l'URSSAF, page 12, s'échelonnent entre le 15 janvier 2014 et le 2 février 2016, ce qui ne correspond nullement aux paiements mentionnés sur le décompte de l'huissier qui totalisent entre le 31 mai 2010 et le 25 janvier 2013, la somme 2 816 euros (43 + 1 995 + 778) outre un paiement de la somme totale de 8 5355 (1 746 + 738 + 2 444 + 2 988 + 619) le 15 janvier 2014 ce qui ne correspond pas aux paiements que l'URSSAF mentionne avoir reçus à cette date, qui totalisent 10 638 euros (7 643 + 2 239 + 756).

La société prouve donc par le courrier de l'huissier mandaté par l'URSSAF pour l'exécution du jugement précité et son annexe détaillée, que les cotisations au titre des années 2007 et au paiement desquelles elle a été ainsi condamnée, ont été payées.

Le jugement qui a débouté l'URSSAF de sa demande en fixation de créance au titre des années 2007 et 2008 doit donc être confirmé. »

 

 

[1] Cour d'appel de Paris - Pôle 6 - Chambre 13 27 septembre 2024 / n° 21/01643

[2] Cour d'appel de Montpellier - 3e chambre sociale 11 septembre 2024 / n° 19/03608

[3] Cour d'appel de Paris - Pôle 6 - Chambre 13 14 juin 2024 / n° 20/06045

[4] Cour d'appel de Montpellier - 3e chambre sociale 11 septembre 2024 / n° 19/03608

[5] Tribunal judiciaire de Lyon - CTX PROTECTION SOCIALE 12 juillet 2024 / n° 22/02296

[6] Cour d'appel de Rennes - 2ème Chambre 2 juillet 2024 / n° 23/05602

[7] Cour d'appel de Rennes - 2ème Chambre 11 juin 2024 / n° 23/05845

[8] Cour d'appel d'Aix-en-Provence - Chambre 4-8b 31 mai 2024 / n° 22/05591

[9] Cour d'appel d'Aix-en-Provence - Chambre 4-8b 31 mai 2024 / n° 22/05591

 




Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

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Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/

Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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