Pouvez-vous être licencié pour vos posts sur LinkedIn ?
📈 Vos posts sur LinkedIn relèvent-ils de votre vie privée et de votre liberté d’expression ?
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Vos posts sur LinkedIn relèvent-ils de votre vie privée ?
Il convient d'apprécier préalablement si la publication reprochée relève de la vie privée.
La Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, a rappelé[1] qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
Elle a ainsi jugé qu'une conversation privée qui n'était pas destinée à être rendue publique ne peut constituer un manquement du salarié aux obligations découlant du contrat de travail.
Au-delà de la définition même du terme de publication, qui induit clairement la volonté de faire connaître publiquement, il convient de vérifier si 'posté' sur le réseau social LinkedIn, relève de la sphère publique ou de la sphère privée.
Ainsi, le réseau social LinkedIn a pour objet de permettre à ses membres d'entretenir des relations entre professionnels.
A ce titre, les salariés y sont présentés par leur nom et le métier qu'ils exercent.
Dans une affaire, la Cour d’appel de Douai a jugé[2] que :
« le message contesté, en lien direct avec ses conditions de travail telles qu'organisées par son employeur, quand bien même il serait réservé aux relations de premier niveau de Madame [M], était accessible à des membres LinkedIn du monde professionnel et partageable à l'infini.
Le caractère public du message déféré se déduit également de ce qu'il s'adresse à un éventuel futur employeur, Madame [M] concluant son message par la phrase suivante : « recherche une autre entreprise pour m'accueillir avec des valeurs et du respect de ses salariés ».
La publication était à ce point publique que, selon la salariée elle-même, elle aurait été portée à la connaissance du président directeur général de la société, qui lui aurait demandé de la retirer dans un délai très court et qui a permis sa convocation à un entretien préalable au licenciement dès le lendemain.
Il s'ensuit que le message déféré, publié, dans ces conditions, sur le réseau social LinkedIn, ne relève pas de la protection essentielle de la vie privée, peu important qu'il ait été publié pendant une période de congés.
L’employeur était, par conséquent, en droit de faire état de ce message dans le cadre d'une procédure disciplinaire. »
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Vos posts sur LinkedIn relèvent-ils de votre liberté d’expression ?
Il convient ensuite d'apprécier si le contenu de la publication reprochée constitue un abus de la liberté d'expression du salarié, de nature à constituer un manquement à son obligation de loyauté à l'égard de l'employeur.
Aux termes de l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
L'exercice du droit d'expression est dépourvu de sanction, sauf abus.
Dans une affaire, la Cour d’appel de Douai a jugé[3] que :
« Deux phrases du message publié sur Linkedin posent difficulté :
- 'Un cluster dans les locaux de l'entreprise, encore un cas confirmé aujourd'hui (...), 24 cas depuis septembre'
L'existence d'un cluster dans l'entreprise n'étant pas établie, les propos tenus par Madame [M] sont diffamatoires.
- 'mais ils attendent d'avoir un mort pour prendre des mesures'
Cette seconde affirmation rédigée au présent, sans aucune précaution, est également diffamatoire, particulièrement excessive et offensante.
Ces propos issus de la publication constituent, dans le contexte bien compris de l'annonce du deuxième confinement lié à la pandémie de Covid 19, effectif le lendemain, un abus de la liberté d'expression de Madame [M], dans sa critique des manquements qu'elle imputait à son employeur.
Reste à savoir si la société était identifiable par les lecteurs du message. Si le nom de l'employeur n'apparaît pas dans la capture d'écran remise par ce dernier, Madame [M] a produit un message téléphonique du président directeur général de la société reçu dans les minutes qui ont suivi la publication litigieuse, ce qui démontre que l'entreprise qu'elle entendait dénoncer était parfaitement identifiable par ses relations du réseau social.
Partant, sortant du cadre de la bonne foi dans les relations de travail, Madame [M] a manqué à son obligation de loyauté à l'égard de la société.
En l'absence d'atteinte à la vie privée et à la liberté fondamentale d'expression de la salariée, son licenciement n'encourt pas la nullité. »
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[1] Ass. Plén. 22 déc. 2022, n° 21.11.330
[2] Cour d'appel de Douai - Sociale A salle 3 31 mai 2024 n° 22/01378
[3] Cour d'appel de Douai - Sociale A salle 3 31 mai 2024 n° 22/01378
Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
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