Rupture conventionnelle : salariés, ne dissimulez pas votre projet d’entreprise !

 

La dissimulation par un salarié de son projet d’entreprise peut entrainer la  nullité de la rupture conventionnelle

 




Un employeur et un salarié ont signé une rupture conventionnelle.

Plus de cinq mois après la rupture de son contrat de travail, le salarié a créé son entreprise.

Suites, l’employeur a saisi le Conseil de Prud’hommes pour solliciter la nullité de la rupture conventionnelle et obtenir le versement de diverses sommes par le salarié.

Selon les articles L 1237-11 et suivants du code du travail, la rupture conventionnelle est un contrat par lequel l'employeur et le salarié conviennent, d'un commun accord, de rompre le contrat de travail à durée indéterminée qui les lie et fixe les conditions de cette rupture.

La signature de la convention de rupture doit être précédée d'un ou plusieurs entretiens entre les parties, au cours desquels le salarié peut se faire assister dans les mêmes conditions que pour un licenciement.

Conformément à l'article L 1237-14 du code du travail, l'accord des parties doit être matérialisé par une convention de rupture, datée et signée par chacune des parties qui dispose d’un délai de 15 jour calendaire pour se rétracter.

À l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse la demande d'homologation de la convention à la DIRECCTE.

Outre que les dispositions légales spécifiques en la matière sont destinées à garantir la liberté du consentement des parties, comme tout contrat, la rupture conventionnelle suppose l'existence d'un consentement effectif et non vicié c'est-à-dire éclairé et obtenu en dehors de toute contrainte ou manœuvre.

Aux termes de l'article 1137 du code du travail,

« Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation. »

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

L’employeur a soutenu que le consentement donné à la rupture conventionnelle a été vicié du fait du dol commis par le salarié.

La Cour d’appel de Toulouse a jugé[1] que l'employeur s'est déterminé au regard du seul souhait de reconversion professionnelle dans le management invoqué par le salarié, du fait du défaut d’information volontaire de celui-ci sur le projet d’entreprise initié dans le même secteur d’activité auquel sont associés deux anciens salariés (le second démissionnera peu après la rupture conventionnelle), ayant tous deux des compétences techniques.

Au vu des éléments découverts sur l'ordinateur professionnel du salarié qui dira dans un échange de SMS : « Honnêtement je suis sûr que tu m'aurais fait la morale et que mon association avec X. ne t'aurait pas convenue de toutes façons », le salarié n'ignorait pas leur caractère déterminant pour l'employeur lui faisant confiance.

La Cour d’appel de Toulouse a considéré que la dissimulation intentionnelle du salarié caractérise un dol de sa part en vue d'obtenir la rupture conventionnelle et ainsi un avantage financier dont il n'aurait pu bénéficier en démissionnant.

Pour la Cour de cassation[2], la Cour d'appel de Toulouse a relevé que l'employeur s'est déterminé au regard du seul souhait de reconversion professionnelle dans le management invoqué par le salarié.

Par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, de la portée des éléments de preuve produits, la cour d'appel a constaté que le salarié avait volontairement dissimulé des éléments dont il connaissait le caractère déterminant pour l'employeur afin d'obtenir le consentement de ce dernier à la rupture conventionnelle.

Elle a ainsi estimé, sans faire peser sur le salarié une obligation d'information contractuelle, ni porter atteinte à sa liberté d'entreprendre, que le consentement de l'employeur avait été vicié.

Lorsque le contrat de travail est rompu en exécution d'une convention de rupture ensuite annulée en raison d'un vice du consentement de l'employeur, la rupture produit les effets d'une démission.

Ayant retenu que la dissimulation intentionnelle du salarié caractérisait un dol et que la convention de rupture était nulle, la cour d'appel a exactement décidé que la nullité produisait les effets d'une démission.

[1] Cour d'appel de Toulouse - 4eme Chambre Section 1 18 novembre 2022 / n° 21/02902

[2] Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 juin 2024, 23-10.817

 

 




 

Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

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Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
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Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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